Immersion audio : Demute développe un casque AHIA

Ingénieur du son, François Fripiat a fondé, il y a trois ans, le studio sonore Demute à Bruxelles pour aborder le marché de la réalité virtuelle, la réalité augmentée, les expériences immersives et le jeu vidéo. Entretien.
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Sonovision : Pour « libérer le son du contenu visuel » selon vous, il faut miser sur le son ambisonique. Pourquoi ?

François Fripiat : L’ambisonie existe depuis la fin des années 70 et constituait mon mémoire de diplôme. À cette époque, il n’y avait pas de contenu justifiant d’encoder ainsi le son. La réalité virtuelle nous permet enfin de déployer cette technique. Mais on s’est vite aperçus qu’il nous manquait des briques technologiques pour la traiter, surtout avec sa dimension interactive. Nous avons donc créé des dispositifs (comme ce tracker de microphone temps réel pour la retransmission en live de contenus sonores) et des algorithmes de spatialisation permettant de simuler le comportement de l’oreille dans un environnement réel. C’est celui-ci qui a été partiellement mis en place sur 11.11.18.

Sonovision : Comment avez-vous procédé sur le tournage de cette production en réalité virtuelle ?

F.F. : Il fallait obtenir la meilleure qualité de son sans utiliser de micro perche qui se serait vu dans le champ. Nous avons donc équipé le plateau avec 23 micros ambisoniques de deuxième ordre. Chaque comédien avait deux micros HF dissimulés dans son vêtement ou son casque. Nous avons caché sur le plateau très boueux des micros adaptés. Il y a eu un gros travail de mixage. Ce que n’aurait pas permis le binaural.

Sonovision : Vous ne préconisez pas le son binaural pour la réalité virtuelle. Pourquoi ?

F.F. : Le binaural fixe ne permet pas de remixer les contenus a posteriori. Après avoir fait des essais en studio avec une tête Neuman, nous nous sommes aperçus que le son le plus agréable restait celui qui avait été respatialisé après coup. Mais je sais que les Français défendent le binaural fixe, les Anglais, qui ont inventé l’ambisonie, beaucoup moins…

Sonovision : Vous travaillez actuellement à la mise au point d’un casque embarqué…

F.F. : Nous travaillons depuis plus de deux ans sur le développement d’un casque AHIA (Augmented Headphone for Immersive Audio). Grâce à une balise de positionnement et un gyroscope, il permet de savoir où se trouve l’auditeur dans l’espace réel, ainsi que la direction de son regard. Grâce à ces informations, nous pouvons décoder le son de manière précise. Et même piloter des écrans, des lumières, des fumées, des odeurs… Nous avons créé une dizaine de prototypes. Courant 2020, nous devrions avoir des belles expériences narratives à présenter.

Sonovision : Pour quel marché ce casque est-il destiné ?

F.F. : Nous croyons beaucoup aux musées ou aux espaces culturels qui autorisent la déambulation et les balades sonores. En fonction du parcours choisi, chaque visiteur peut déclencher des contenus appropriés. Si ce dispositif peut utiliser le réseau wi-fi du musée, il demande néanmoins une infrastructure à mettre en place sous forme de petites balises.

 

Extrait de l’article paru pour la première fois dans Sonovision #16, p.20-24. Abonnez-vous à Sonovision (4 numéros/an + 1 Hors-Série) pour accéder, à nos articles dans leur totalité dès la sortie du magazine.